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Immobilier de luxe à Madrid : l’Amérique débarque, la Catalogne investit

À Madrid, le marché du luxe flambe. Catalans en quête de stabilité, Américains en mal d’Europe : tous misent sur la capitale espagnole, nouveau terrain de jeu des grandes fortunes.

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Photo : Pexels
Écrit par Paul Pierroux-Taranto
Publié le 9 juin 2025, mis à jour le 10 juin 2025

Madrid, l’exil doré des fortunes catalanes

Ils ne viennent pas avec des drapeaux, mais avec des chèques. À Madrid, les Catalans investissent dans la pierre, et pas n’importe laquelle : celle qui brille. Dans le segment très sélect des logements à trois, quatre, cinq millions d’euros, ils arrivent juste derrière les Madrilènes. Selon l’agence Knight Frank, 55 % des ventes de biens de luxe reviennent à des Espagnols — dont une bonne tranche, entre 10 et 15 %, vient de l’autre côté de l’Ebre.

Un mouvement amorcé au temps du procés, quand l’instabilité politique en Catalogne a poussé certains à chercher refuge ailleurs. Depuis, la tendance s’est installée : cap sur Madrid, perçue comme un îlot de stabilité, d’opportunités et de rentabilité. Un « oasis » dans un pays où les tensions régionales s’exacerbent. Et un choix qui s’accompagne d’une manière bien particulière de consommer le luxe : discrète, pragmatique, et surtout… liquide.

 

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Du cash contre des clefs

Car à Madrid, le luxe s’achète comptant. Dans 90 % des cas, aucune banque à l’horizon. Pas d’hypothèque, pas de taux variable, juste un virement à plusieurs zéros. Et une fois les clefs en main, trois acheteurs sur quatre s’installent pour de bon. Pas de spéculation effrénée, mais une stratégie patrimoniale bien ancrée : sécuriser, transmettre, consolider.

Cette dynamique s’inscrit dans un contexte favorable à la capitale : amélioration des infrastructures, essor du tourisme, montée en gamme des hôtels et écoles de commerce. Résultat : Madrid rivalise désormais avec les grandes métropoles européennes du secteur, comme Paris ou Milan.

 

Les Latino-Américains en tête des acheteurs étrangers

Et à en croire l’étude, dans les beaux quartiers de Madrid, il semblerait qu’on entende souvent l’accent du Río de la Plata ou des Andes. Les Latino-Américains trustent le haut du panier des acheteurs étrangers, avec un tiers des ventes (33 %) à plus d’un million d’euros.

Leur terrain de jeu ? Les quartiers huppés de Salamanca, Chamberí ou Centro, où ils posent valises et capitaux. Leurs nationalités varient en fonction des contextes politiques de leurs pays d’origine, mais leur appétit pour la capitale espagnole reste intact depuis la pandémie.

Mais rapporté à l’ensemble du marché immobilier madrilène, la présence étrangère reste marginale. En 2024, seules 5,8 % des ventes dans la région ont été conclues par des non-Espagnols — soit 4.497 transactions sur plus de 77.000. Le marché est donc très largement national, même si l’international y occupe un créneau stratégique, très ciblé et de plus en plus courtisé.

 

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Le soleil, le luxe et la pierre : l’Espagne séduit l’Amérique

Une évolution notable concerne les acheteurs nord-américains, qui débarquent aujourd’hui en nombre, portefeuille bien garni. En quatre ans, ils ont triplé leur présence sur le marché immobilier espagnol. De 620 achats en 2020, ils sont passés à 2.199 en 2024. Une ascension éclair qui les propulse à 8 % des transactions étrangères.

Madrid, Barcelone, Valencia… Les grandes villes attirent ces nouveaux venus d’outre-Atlantique, souvent séduits par la douceur du climat, le coût de la vie — et peut-être aussi par une idée européenne du luxe, plus feutré qu’ostentatoire.

 

Autour de Madrid, la ruée vers l’or

Pas besoin d’aller jusqu’à Marbella pour croiser des portails motorisés, des pelouses taillées au cordeau et des prix à sept chiffres. Neuf des dix communes les plus recherchées d’Espagne pour les biens haut de gamme se trouvent dans la région madrilène. Majadahonda, Pozuelo de Alarcón, Boadilla del Monte, La Moraleja… toutes affichent des prix moyens au-dessus de 1,2 million d’euros, selon les derniers chiffres d’Idealista.

La demande y est forte, l’offre plus discrète. Résultat : tension sur le marché, hausses continues, et un paysage résidentiel où le mètre carré est devenu un marqueur social autant qu’un placement. Le luxe s’éloigne peut-être du centre, mais jamais du pouvoir.

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