Édition internationale

Mujeres Avenir alerte sur la violence économique subie par 3 millions d’Espagnoles

Elles sont plus de trois millions de femmes en Espagne à subir, souvent dans le silence, une forme de violence encore méconnue : la violence économique. C’est ce qu’a dénoncé l’association d’amitié hispano-française Mujeres Avenir, lors d’un événement organisé au Club Financiero Génova de Madrid, en partenariat avec BNP Paribas, sous le mot d’ordre : « Contre les violences économiques ».

les intervenantes de mujeres avenir pour la recnontre sur les violences economiques en espagneles intervenantes de mujeres avenir pour la recnontre sur les violences economiques en espagne
Mujeres Avenir

Souvent tapie dans l’ombre, la violence économique est aujourd’hui la troisième forme de violence de genre la plus répandue en Espagne, après la violence psychologique de contrôle et la violence émotionnelle. Elle ne laisse pas de traces physiques, mais elle ronge la liberté : priver une femme de ses ressources, l’empêcher de travailler, l’endetter à son insu… Autant de mécanismes insidieux qui visent à affaiblir son autonomie et à la maintenir sous emprise.

Longtemps ignorée, cette forme de maltraitance est pourtant reconnue depuis 2011 par le Conseil de l’Europe, via la Convention d’Istanbul. Pourtant, l’Espagne ne l’a toujours pas intégrée pleinement comme violence de genre dans son code pénal, à la différence de la France, l’Inde, le Brésil ou l’Angola, qui ont franchi ce pas.

Pour Rebeca Ávila, présidente exécutive de Mujeres Avenir, cette injustice doit cesser : « Là où il y a équité financière, il y a liberté ; là où il y a contrôle économique, il y a soumission », affirme-t-elle. Elle appelle à nommer, visibiliser et combattre cette violence trop souvent banalisée ou méconnue, et qui touche pourtant des millions de femmes.


 

des intervenantes de mujeres avenir lors du débat sur les femmes victimes de violences économiques
Mujeres Avenir.

 

 

 

Sous emprise économique : le piège invisible qui enferme les femmes

Autour d’une table ronde modérée par Anne Viard, associée chez Forvis Mazars et vice-présidente de Mujeres Avenir, plusieurs intervenantes ont dressé un constat sans appel.

Silvia Gómez, professeure d’économie financière à l’université d’Oviedo, a rappelé que la violence économique « hypothèque l’avenir des femmes et de leurs enfants », et freine plus largement « le développement économique et social ». Elle appelle à des politiques publiques garantissant l’égalité économique.

De son côté, Lucía Medina, directrice générale de la fondation Nantik Lum, a insisté sur l’enchevêtrement de la violence économique avec les autres formes de maltraitance, enfermant les femmes dans des cycles de dépendance. Elle a souligné que le manque de formation financière et les tabous sociaux jouent un rôle central dans cette invisibilisation.

 

 

Salle comble pour la rencontre sur les violences économiques subies par les femmes en Espagne
Mujeres Avenir. / Salle comble pour la rencontre sur les violences économiques subies par les femmes en Espagne.


 

 

Des solutions concrètes face à un vide juridique préoccupant en Espagne

Claudia Belli, responsable du programme d’autonomisation des femmes à la Fondation BNP Paribas, a rappelé avec force que l’indépendance financière ne devrait jamais être un privilège, mais un droit humain fondamental. À l’appui de cette conviction, elle a présenté des solutions concrètes : le compte Nickel, par exemple, permet à une femme d’ouvrir un compte bancaire sans envoi de courrier à son domicile – un outil discret et crucial pour celles vivant sous le contrôle d’un conjoint violent. 

Elle a aussi salué les initiatives de l’assureur AXA, qui intègre désormais dans ses contrats habitation des garanties spécifiques en cas de violences conjugales, incluant relogement d’urgence, aide juridique et soutien psychologique.

De son côté, Claudia Ambros Biern, avocate senior chez M&B Abogados, a pointé les carences du cadre juridique espagnol. Tant que la violence économique ne sera pas reconnue comme un délit à part entière, il restera difficile d’en protéger efficacement les victimes. Elle déplore que des cas comme l’impayé de pensions alimentaires soient encore traités au civil, privant les victimes d’un véritable levier judiciaire. Seules certaines régions, comme la Castille-et-León, commencent à tracer la voie avec une reconnaissance explicite de cette forme de violence.

 

 

 

10 ans de Mujeres Avenir: "Faire valoir en Espagne le rayonnement féministe français"

 

 

Les entreprises, actrices du changement

En conclusion, Cecilia Boned, présidente de BNP Paribas Espagne, a rappelé le rôle essentiel des entreprises dans la construction d’une société plus égalitaire. Selon elle, les inégalités économiques persistantes entre femmes et hommes – qu’il s’agisse de salaires, d’accès au crédit ou d’éducation financière – forment un terreau propice à la violence économique. À ce titre, le secteur privé a la responsabilité d’agir.

« Un avenir juste et égalitaire passe par l’élimination de toutes les formes de violence faites aux femmes – et la violence économique ne fait pas exception », a-t-elle affirmé.

L’événement s’est clôturé par un moment d’échange convivial autour d’un verre de vin espagnol, offrant aux participantes et participants l’opportunité de prolonger les discussions et tisser des liens, dans un esprit engagé et chaleureux.

 

À propos de Mujeres Avenir : l’association d’amitié hispano-française Mujeres Avenir œuvre depuis plusieurs années à la promotion de l’égalité réelle entre femmes et hommes. Soutenue par l’Ambassade de France en Espagne, le Ministère de l'Égalité et le Ministère des Affaires étrangères espagnol, elle rassemble des femmes de différents horizons professionnels pour faire avancer leurs droits et renforcer les liens entre la France et l’Espagne.

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