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Le Portugal face au défi touristique : entre essor économique et quête de durabilité

Le Portugal bat des records de fréquentation touristique, représentant une part importante de son économie. Mais derrière la croissance économique, ce modèle est-il durable à long terme et quels en sont les risques ?

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@MJ Sobral
Écrit par Lison Segui
Publié le 21 mai 2025


En 2025, le Portugal s'apprête à franchir un cap historique avec 33 millions de visiteurs attendus et 6,5 milliards d'euros de recettes touristiques. Si cette croissance consolide le rôle majeur du tourisme dans l'économie portugaise, elle soulève également des enjeux sociaux, urbains et environnementaux que le pays s'efforce de contenir.


Le tourisme au Portugal : un pilier économique

Le tourisme au Portugal représente une part économique importante pour le pays et une contribution directe au PIB. Selon l'OCDE, en 2022, le Portugal était le deuxième pays européen avec la plus forte contribution du tourisme à son PIB (15,6 %), derrière l'Islande (17,4 %).

Selon l'Institut National de Statistique (INE), 31,6 millions de touristes ont été accueillis en 2024, soit une augmentation de 5,2 % par rapport à 2023. Parmi eux, 19,4 millions étaient des visiteurs étrangers. Les revenus liés au tourisme ont atteint 27,7 milliards d'euros en 2024, marquant une hausse de 8,8 % par rapport à l'année précédente. Enfin, en 2024, les nuitées des non-résidents ont représenté 70,3 % du total, atteignant ainsi le niveau le plus élevé depuis 2018.

En 2024, le Conseil mondial du voyage et du tourisme (WTTC) estime la contribution du tourisme dans l'économie portugaise à plus de 54 milliards d'euros, soit près de 20 % de l'économie nationale.

Cependant, cette dépendance structurelle au secteur touristique favorise la précarisation de l'emploi. De plus, il entraîne une dépendance à ce secteur, comme vu lors de la pandémie : avant le confinement, le tourisme représentait 19,5 % des exportations totales. En 2020, cette part est tombée à 10,4 %, selon l'OCDE. Il y a donc peut-être une volonté gouvernementale de renforcer d'autres secteurs comme les énergies renouvelables, et d'approcher un modèle économique plus résilient et inclusif mais il faudra être attentif à l'avenir pour voir quels sont les choix plus définitifs qui sont faits.


Lisbonne et Porto sous saturation urbaine

Le succès de ce tourisme n'est cependant pas sans conséquence, et s'accompagne bien souvent de la surfréquentation. Un réel boom hôtelier s'est opéré, avec l'ouverture de 41 hôtels à Lisbonne en seulement 3 ans entre 2020 et 2023.

Dans la capitale, cela a un vrai impact sur certains quartiers historiques surfréquentés comme le Bairro Alto et l'Alfama. Cette surfréquentation entraîne une hausse des loyers, une pression sur les résidents et une augmentation du coût de la vie. En 2018, Lisbonne était la ville européenne qui comptait le plus de résidences Airbnb par habitant, selon une étude réalisée par Le Monde diplomatique en 2019 et cela semble bien avoir continué sur la même lancée ces dernières années.
Porto connaît des dynamiques similaires, avec des quartiers comme celui de la Ribeira saturés par le tourisme, au détriment du cadre de vie local.


Vers un tourisme plus durable

Face à ces défis, le Portugal a tenté certaines actions en faveur du tourisme durable. Le pays essaye de minimiser l'impact négatif sur l'environnement et la culture locale de ce tourisme de masse, de maximiser les bénéfices pour les populations locales et préserver les ressources naturelles et culturelles à long terme.

A l'échelle nationale, le gouvernement a présenté en 2021 le « Tourism 2027 » : un programme qui vise à faire du Portugal une destination de référence pour un tourisme responsable et inclusif. Ce programme intègre les Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations Unies, notamment sur l'ODD 12 portant sur la consommation et la production responsable. Nous verrons dans les prochains temps, si ce programme donne des résultats convainquant.


Des initiatives locales concrètes

Certaines villes tentent également de mettre en place des actions locales. À Porto, la ville expérimente un modèle de tourisme durable pour désengorger les zones surfréquentées. En répartissant les flux touristiques au-delà des zones traditionnelles, la ville tente de préserver les quartiers historiques et d'encourager la découverte de zones moins connues comme le quartier de Campanhã, ou le quartier de Bonfim, autrefois industriel et maintenant devenu un quartier artistique alternatif tendance.

La région de l'Alentejo, quant à elle, tente de se diriger vers l'écotourisme. Attirant une clientèle en quête d'authenticité, la région met en avant sa culture locale avec par exemple la dégustation de vins et la découverte de l'artisanat. De quoi mettre en avant la culture locale, profiter à l'économie, tout en conservant le tourisme.


Les labels promoteurs d'un tourisme vert

Enfin, le Portugal voit l'émergence de labels écologiques et certifications durables pour diriger le tourisme vers cette transition. Des agences comme IN TOURS Portugal obtiennent des certifications comme Travelife Partner, témoignant d'un engagement croissant pour un tourisme responsable.
Des récompenses comme la « Green Key » encouragent les établissements à s'acheminer vers le tourisme durable. Le programme « Green Keys » est un prix international qui promeut le tourisme durable au Portugal à travers la reconnaissance des établissements touristiques, des hébergements locaux, des campings et des restaurants qui mettent en œuvre de bonnes pratiques environnementales et sociales et qui valorisent la gestion environnementale dans leurs établissements. Ces initiatives offrent des repères clairs pour guider les touristes souhaitant voyager de manière plus responsable.

Le Portugal, entre prospérité économique et pressions sociales, semble vouloir tracer une voie vers un tourisme plus équitable et durable. Cela se fera-t-il vraiment dans le temps avec de véritables résultats sur le moyen terme ? l'avenir le dira. En effet, la dépendance au secteur touristique actuel semble être un défi de taille.

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