Partir en immersion pour apprendre l’espagnol ? Facile… aussi facile que de réussir une tortilla sans la renverser. Spoiler : si vous n’avez jamais retourné une tortilla, préparez-vous à une surprise. C’est justement au moment où vous pensez que le plus dur est derrière vous… que ça se complique. Et avec l’immersion, c’est pareil : vivre en Espagne ne suffit pas toujours à faire parler espagnol.


Apprendre l’espagnol en immersion : il faut savoir retourner la tortilla.
J’ai souvent entendu dire que l’immersion était le meilleur moyen d’apprendre une langue. D’abord de la bouche de mes professeurs, pour qui c’est une manière d’affiner son expression et de développer sa compréhension.
Mais j’ai aussi entendu dire Jeannette, celle de mon village qui n’a jamais quitté la France ni appris d’autre langue, affirmer : “Vivre dans le pays, ça rend bilingue !” Et elle n’est pas la seule. Il y a aussi la voisine, celle qui regarde les documentaires sur les Français qui s’installent en Espagne, et qui en ressort avec la même conviction.
Depuis que j’accompagne des francophones dans leur apprentissage de l’espagnol pour vivre en Espagne, cette idée reçue (qui, je l’avoue, commence sérieusement à m’agacer) me pousse à écrire cet article : Qu’est-ce que l’immersion ? Pourquoi fonctionne-t-elle pour certains et pas pour d’autres ? Et surtout, comment passer de l’illusion à la véritable maîtrise ?
Vamos, il est temps de darle la vuelta a la tortilla sur ce sujet aussi passionnant que mal compris.

Vivre en Espagne, est-ce vraiment vivre en immersion ?
Non, l’immersion n’est pas une baguette magique.
Si vous pouviez dessiner l’immersion, à quoi ressemblerait-elle ? Sûrement à quelqu’un en terrasse avec des amis espagnols, un café con leche à la main, en pleine discussion. C’est l’image qu’on nous vend partout : à la télé, dans les reportages… ou dans la tête de Jeannette. Mais pour beaucoup de Français vivant en Espagne, ce n’est pas la réalité. Et pourtant, ça devrait l’être, non ? Car en immersion, on est censé baigner dans la langue 24h/24 !
Sauf que les mois passent. Un an, deux ans, trois ans… et les difficultés s’accumulent. On n’ose pas parler. On se sent mal à l’aise. Puis la culpabilité s’installe : « Ça fait plus de cinq ans que je suis là, et je n’arrive toujours pas à m’exprimer. » Ce n’est pas vraiment ce qu’on avait imaginé. On rêvait d’une vie festive, conviviale — à l’image de l’Espagne. Et finalement, on se retrouve… seul. On sourit en serrant les dents, en se demandant : « Mais qu’est-ce que je vais bien pouvoir répondre ? »
Alors je vous repose la question : Vivre en Espagne, est-ce vraiment vivre en immersion ? C’est là que commence l’illusion : croire que le simple fait d’habiter dans un pays suffira, par magie, à faire progresser.
Vivre en Espagne : ce que j’imaginais… et ce que j’ai découvert
Les pièges de l’immersion linguistique
Au début, ça semblait si simple (bon, sauf les galères administratives). On part, on s’installe, on attend quelques mois… et hop, on parle espagnol. Et si je vous disais qu’une immersion, ça se préparait ? Qu’il ne fallait pas forcément attendre d’être dans le pays pour commencer à le comprendre ?
Parce que vivre en Espagne ne garantit ni de s’y sentir intégré, ni de parler avec aisance. Les mots n’arrivent pas comme par magie. Mais les pièges, eux, arrivent très rapidement :
1) L’idéalisation
Soleil, tapas, ambiance détendue… Une Espagne parfois fantasmée. Il y a des clichés, comme dans tous les pays, mais quand on s’y installe, il faut savoir décoder les habitudes, les traditions, les accents parfois très prononcés. Sinon, le choc culturel peut être rude — et freiner l’envie de s’intégrer.
2) La zone de confort
C’est rassurant de rencontrer quelqu’un qui parle notre langue. Entre collègues, colocs, groupes Facebook francophones, on se sent moins seul. Mais attention : sortir entre francophones dans un bar, ce n’est pas de l’immersion.
3) L’écoute passive : le piège du silence
On se dit qu’écouter, “ça suffira”. Qu’à force d’entendre, “l’oreille va se faire”. Mais écouter ne veut pas dire interagir. Or, pour progresser, il faut apprendre à répondre, à argumenter, à défendre ses idées — même maladroitement.
Mais souvent, par peur de déranger ou de ralentir la conversation, on préfère se taire. Et peu à peu, on finit par croire que l’immersion ne fonctionne pas. On pense que le problème, c’est nous : « Les langues, ce n’est pas pour moi. » « Je suis trop vieux / vieille pour apprendre. » « Je n’ai pas le temps. » Et pourtant… d’autres y arrivent.
Alors, qu’est-ce qui fait la différence ? Et si, finalement, ce n’était pas (juste) une question de temps ou de talent… ? Allez, il est l’heure de retourner la tortilla !
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Pourquoi certains progressent en espagnol… et d’autres non
Est-ce que ça match vraiment ?
Comment expliquer qu’une personne qui n’a jamais mis les pieds en Espagne puisse mieux parler espagnol que vous, qui y vivez depuis plus d’un an ? La réponse ? C’est l’immersion, oui… mais celle qu’on construit.
Vivre en Espagne ne signifie pas automatiquement parler couramment la langue.
L’immersion, la vraie, ne se commande pas. Elle ne tombe pas du ciel : elle se construit. Prenons deux profils fictifs. Deux réalités. Deux immersions.
Claire, 35 ans
Elle vit à Saragosse depuis un an. Elle adore la vie en Espagne, mais se sent souvent à l’écart. Elle comprend quand on lui parle, mais évite les conversations longues, par peur de ne pas suivre ou de ralentir les autres. Elle travaille dans une entreprise francophone, fait du yoga deux fois par semaine à 9h, prend les transports en commun en écoutant sa musique, et va seule lire dans son coffee shop préféré. Mais elle ne se sent pas connectée aux Espagnols. Les cours intensifs n’y ont rien changé : elle ne se sent pas à l’aise quand elle doit parler.
Laure, 30 ans
Elle s’est installée à Séville il y a huit mois. Elle fait encore des fautes, confond parfois les mots entre le français et l’espagnol… mais elle parle. Tout le temps. Avec son voisin, aux ateliers de céramique, au sport, dans les cafés… Elle saisit chaque occasion. Elle ose, quoi qu’il arrive. Elle n’avait pas un niveau brillant au lycée, mais elle a fait un choix : celui d’oser, de se jeter à l’eau.
Car ce qui fait la différence, ce n’est ni le temps passé dans le pays, ni l’âge, ni un soi-disant "don pour les langues". Ce qui change tout, c’est l’attitude : celle que vous adoptez face à la langue, dans votre quotidien, avec votre entourage… et votre envie réelle de vous challenger dans cette vie en Espagne.
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Vos engagements = votre immersion réussie
L’immersion en Espagne — la vraie — commence bien avant de maîtriser la langue. Elle commence avec soi-même, à notre échelle, dans notre propre réalité. Avec une routine simple… mais régulière.
Comme un « ¿Qué tal ? » lancé chaque matin à sa voisine, avec le sourire, même si on ne comprend pas tout. Moi, par exemple, je fais de la danse orientale chaque mardi depuis trois ans. Même quand j’étais fatiguée, même quand mon cerveau n’était pas du tout « en mode espagnol », j’y allais. Et aujourd’hui, ça fait partie de ma vie.
S’engager, ce n’est pas forcément être partout, ni rencontrer un maximum de gens. C’est tenir une routine, créer du lien, se faire une place. Et peu importe votre niveau d’espagnol : à force de régularité, il s’améliorera. Parce qu’en vrai, c’est la constance qui fait la différence.
Conclusion : la tortilla se retourne à force d’essayer
Non, l’immersion ne vient pas juste en vivant en Espagne. Elle se construit, petit à petit, à votre rythme, selon votre propre réalité.
Mes deux conseils :
- Ne partez pas avec de fausses illusions
- Mettez en place des actions concrètes, dès le départ
Et rappelez-vous : comme une tortilla, on ne la retourne pas du premier coup. Elle ne sera pas parfaite, mais ce sera la vôtre. Au début, elle collera peut-être au fond de la poêle, manquera de sel, ou les patates seront un peu trop fermes… Mais rien ne vous empêche de demander conseil à votre voisine — celle à qui vous dites bonjour tous les matins.
Parce que c’est ça, l’immersion : pas une recette magique, mais un apprentissage pas à pas, avec beaucoup de courage, de régularité… et de persévérance. Et à force d’y croire, d’ajuster, de continuer — vous finirez par retourner votre tortilla… sans même y penser.
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